Nous avons découvert cette exposition à l’occasion du dernier Before, Exotiques? au musée du Quai Branly.
PEINTURES DES LOINTAINS.


Cédant d’abord à la tentation de l’exotisme – où l’exaltation de la couleur et de la lumière sert les rêves d’un Orient de luxe et de volupté – il figurera par la suite un regard plus réaliste, ethnographique, attentif à l’autre.
Deux points de vue s’affrontent lors de cette exposition. D’un côté cet idéal des colonies où tout est édulcoré, maquillé et fantasmé et de l’autre une représentation réelle de ces peuples asservis vue et vécue par certains artistes
Avec cette peinture par exemple où l’on n’hésite pas à représenter la femme algérienne comme la princesse qui s’ennuie. Parée de dorure et de perles précieuses, elle n’a rien d’autre à faire que de donner des ordres à son esclave. Exotique ?
L’Odalisque dit aussi l’Algérienne et son esclave de Ange Tissier. L’artiste français Ange Tissier n’a jamais voyagé en Afrique du Nord. Ce portrait évoque ni plus ni moins qu’un orient fantasmé.

A l’opposé nous avons ce portrait réaliste de femme algérienne Tête de femme de Biskra signé Marie Caire Tonoir qui elle a réellement voyagé en Afrique du Nord.

Exotique? Un point d’interrogation qui prend tout son sens tant cette exposition fait la lumière sur cette fascination (mais surtout sur la conquête) des territoires lointains par l’Occident. Au total 220 oeuvres inédites sur environ 500 datées de la fin du XVIIIeme siècle jusqu’au milieu du XXeme siècle ont été « remontées à la surface ». Plus qu’une expo, c’est une réflexion sur les actes passés.
Cette collection est particulière, puisqu’elle appartient à cette époque des colonies, cette époque de conquêtes dont il fallait absolument vanter l’utilité et les bienfaits. Afin de comprendre un peu et de poursuivre la réflexion, il est important de retourner dans le contexte de l’exposition coloniale de 1931.
Vues de Paris, l’Afrique et l’Océanie ressemblaient à un jardin d’Eden plein de panoramas féeriques et de femmes engageantes. Lumière nouvelle, végétation luxuriante et foules pittoresques étaient l’alpha et l’oméga de l’outre-mer. Très vite, cet orientalisme de salon et cet exotisme sucré à la Paul et Virginie cèdent la place à des oeuvres authentiques réalisées sur place. L’art devient aussi affaire d’ethnographie ou de reportage. Les artistes mettent leur talent au service de la représentation de la transformation des paysages et l’exploitation de leur ressources sous l’influence des colons.
Propagande par tous les moyens.
L’exposition coloniale promettait un tour du monde en un jour. Mieux, elle se voulait rassurante auprès de ses visiteurs, vantant les mérites d’un empire protecteur et civilisateur des pays colonisés. Un mot d’ordre, affirmer les valeurs de la France.
Dans une Europe en pleine expansion coloniale, face au choc d’un monde qui lui ouvre ses portes, l’art occidental emprunte différentes voies.
Cédant d’abord à la tentation de l’exotisme – où l’exaltation de la couleur et de la lumière sert les rêves d’un Orient de luxe et de volupté. Il figurera par la suite un regard plus réaliste, ethnographique, attentif à l’autre. Entre onirisme et naturalisme, fantasme et documentaire, romantisme et propagande coloniale, un miroir de
l’histoire artistique et politique. À travers cette collection, c’est aussi l’histoire d’une rencontre avec l’Autre et l’Ailleurs qui est contée, l’évolution du regard artistique face à l’inconnu qui est questionnée. Une collection composite et largement méconnue, où l’odalisque d’Ange Tissier côtoie les portraits d’Amérindiens de George Catlin, les scènes de vie quotidienne cairote d’Émile Bernard voisinent les estampes et dessins de Tahiti signés Matisse ou Gauguin.
Ici, deux tableaux de l’artiste français Géo Michel faisant partie d’un ensemble qui lui a été commandé en 1931 par les organisateurs de l’Exposition coloniale. Les visiteurs avaient ainsi une présentation des apports des colonies à la métropole. Ces peintures nous montrent les produits d’origine végétale, animale et exotique qui étaient acheminés en métropole.
Le peintre au service de la propagande coloniale expose un jardin d’Eden avec sa nature abondante et généreuse. A aucun moment le visiteur perçoit la réalité (volontairement occultée) qui est l’exploitation de ces peuples réduits à l’état d’esclavage et le pillage de leurs richesses.

Deux regards s’opposent à nous lors de cette visite, celui de l’occident des années 30 et celui d’aujourd’hui, le nôtre. Deux mondes aux antipodes. Comment l’un percevait les peuples et territoires dits exotiques et comment nous vivons de nos jours avec ce passé dont il n’y a pas de quoi être fier. Un passé aux idées racistes, avec d’un côté des peuples assoiffés de richesse et de domination et de l’autre des populations asservies et pillées dans la plus grande banalité.
Les colonies s’étendent sur un territoire de 12 millions de kilomètres carrés. Des sociétés d’artistes coloniaux se créent.
Paul et Virginie portés par les esclaves (ancien titre Paul et Virginie portés par les nègres)

L’idéal exotique.
Lorsque Gauguin part pour la Polynésie (décrite par Bougainville) à la recherche d’un idéal exotique, primitif et sauvage il se rend compte que la civilisation était passé avant lui. Au lieu de jeune filles nues se prélassant, ils trouvent des Tahitiennes recouverte par les missionnaires. Qu’à cela ne tienne, il les représentera telles qu’il souhaite les voir. Exotiques ?
Exposition visible jusqu’au 06 janvier 2019 au musée du Quai Branly Jacques Chirac.
Commissaire : Sarah Ligner, responsable de l’Unité patrimoniale mondialisation historique et contemporaine au musée du quai Branly – Jacques Chirac.
Voilà une exposition que j’aimerais visiter !
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C’est une expo très instructive. Ces deux visions qui se confrontent, c’est vraiment intéressant. Et le musée du quai Branly a une très très belle collection permanente.
Tu as jusqu’en janvier 2019 😉
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