Le Marais cette zone (jadis) humide

A l’occasion de ce nouveau mois pour le collectif #EnFranceAussi nous retrouvons Mitchka de Fish & Child qui prend les rênes de février avec pour thème

Zones humides

Mitchka souhaite que l’on mentionne des zones humides, de la boue, des marécages. Vas trouver une zone humide à Paris. Mitchka tu ne pouvais pas nous demander Zones polluées à la place ?

La définition du terme selon le code de l’environnement, les zones humides sont des « terrains, exploités ou non, habituellement inondés ou gorgés d’eau douce, salée ou saumâtre de façon permanente ou temporaire; la végétation, quand elle existe, y est dominée par des plantes hygrophiles pendant au moins une partie de l’année». (Art. L.211-1) © zoneshumides.org (info trouvée chez Mitchka)

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Cet article participe au rendez-vous mensuel #EnFranceAussi. Un rendez-vous instauré par Sylvie du blog  Le coin des voyageurs qui permet de (re) découvrir les richesses que nous offre ce superbe pays qu’est la France.

 

Dans les temps jadis se trouvait à Paris une zone marécageuse. Délimitée aujourd’hui par les places de la Bastille, de la République et de l’Hôtel de Ville elle forme un triangle presque isocèle.

Le Marais

Quartier branché et touristique par excellence avec 27 millions de visiteurs par an. Ça fait peur hein, du moins ça donne le tournis, mais le Marais c’est avant tout le quartier le plus historique de Paris, né dans la boue. Pris en mains par les moines à partir du XIIème siècle, il a connu son heure de gloire entre les XVIème et XVIIème siècle. Snobé par la noblesse, ruiné après la révolution , et finalement sauvé de la dérive dans les années 60 par le ministre de la culture de l’époque André Malraux.

A cheval sur les 3ème et 4ème arrondissements il traverse les époques avec panache. Il est une source inépuisable d’histoires. Des histoires qui nous racontent la grande. Le Marais c’est une âme, un sacré caractère. Il est passé hors des mailles du filet  Haussmann évitant ainsi de perdre son identité. Nous ne sommes pas au bout de nos surprises en nous promenant dans ce fameux « triangle ». Ayez l’œil, un coin de rue, une façade, un toit, une porte peut révéler bien des trésors. Asséché puis habité, le Marais a conservé sont caractère bien trempé (jeu de mots pourri pour tenter de ne pas être hors sujet). Chacha, cet article est pour toi. Il me semble avoir lu quelque part que tu aimes ce quartier.

La gadoue

Depuis la nuit des temps, tout du moins depuis la préhistoire, les emplacements où se situent aujourd’hui les places de la République et Bastille ne ressemblaient à rien d’autre qu’un vaste marécage. Une gadoue dont personne ne se souciait. C’est sur l’ile de la Cité que ça se passait. La Seine déjà présente coulait à cet endroit, le traversant en formant une boucle. 
Au cours des Xe et XIe siècle ce territoire de la rive droite va grâce à son port se développer 
autour de la place de Grève aujourd’hui place de l’Hotel de Ville

Empreinte de l’Ordre des Templiers et Charles V

Au XIIème siècle des moines déterminés assèchent les marécages pour mettre en culture cette zone humide . Certains noms de rues, boulevards ou jardins nous rappellent la présence des Chevaliers de l’Ordre des Templiers. Les rois de France depuis Philippe Auguste et Charles V ont également contribué à l’évolution de ce quartier. Construite entre 1190 et 1220 la partie rive droite de l’Enceinte Philippe Auguste englobe le Marais qui de ce fait se retrouve dans le Paris intra-muros. Des vestiges se tiennent debout dans les rues des Francs-Bourgeois, du Pavé, du Prévôt ou encore rue Charlemagne. Au XIV ème siècle Charles V va édifier une forteresse à la limite des terres insubmersibles, la Bastille qui dit on fut construite en plein marécages. De nouveaux territoires ainsi asséchés vont permettre de construire encore et encore. L‘Hotel des Tournelles à l’origine une « simple » maison fut longtemps la propriété des rois de France. Il doit son nom (tournelle signifie petite tour) à la quantité de tours qui le composaient. François 1er le boude pour le château de Fontainebleau, les châteaux de la Loire et bien entendu le Louvre. Situé au Nord de l’actuelle place des Vosges ce château verra sa fin à la mort d’Henri II (fils de François 1er et époux de Catherine de Médicis) Lors d’un tournois organisé à l’occasion des mariages de sa sœur et de sa fille Henri II est mortellement blessé. Après une longue agonie, Henri meurt à l’Hôtel des Tournelles. Catherine sa veuve qui détestait cette demeure la fit raser.

Henri IV et le Marais étroitement liés

L’empreinte du bâtisseur est très forte dans la capitale, essentiellement dans le Marais. Le bon roi Henri va radicalement le métamorphoser et en faire un lieu où il faut vivre et être vu. Les Hôtels parisiens vont s’ériger, invitant ainsi la noblesse à s’installer dans le quartier. Difficile d’imaginer qu’en lieu et place des marécages puis des cultures, se dressent fièrement encore aujourd’hui les Hôtels de Sully, Carnavalet, Clisson, Donon, Lamoigno, mais aussi l’église Saint-Louis-Saint-Louis et toutes ces demeures vestiges d’un passé flamboyant. Tourelles ou façades le moindre petit détail a son importance.

Se promener aujourd’hui dans le Marais

Pour profiter pleinement de ce quartier unique, ne cherchez pas un itinéraire tout tracé. Aventurez vous, perdez vous dans ses rues et ruelles. Ouvrez les portes, (euh je n’ai pas dit d’entrer chez les gens ok), engouffrez vous dans ses impasses. Le Marais ne vous décevra jamais. D’autant que certains de ses nombreux hôtels particuliers abritent aujourd’hui les plus beaux musées de Paris
Prêts pour une balade ? Fermez les yeux, imaginez-vous les pieds dans l’eau, du moins bien trempés et des saules à perte de vue. Commençons par le charmant square du Temple. Où se trouvait comme son nom l’indique l’Enclos du Temple qui s’élevait depuis 1240 hors de l’enceinte Philippe Auguste il fut intégré à Paris par l’enceinte Charles V. Les moines templiers ont contribué à rendre cette zone humide habitable. A la Révolution la tour de cet enclos la Tour du Temple fut la première prison de la famille royale. Une reconstitution de leur cellule se trouve au musée Carnavalet lui même installé dans le Marais. Lorsque Louis XVI quitte sa geôle c’est pour prendre la direction de l’échafaud, alors que Marie-Antoinette sera transférée à la Conciergerie. C’est à la prison du Temple que leur fils le Dauphin Louis XVII serait mort. Aujourd’hui il ne reste plus rien de l’enclos et de sa bâtisse démantelée par Napoléon. A la place ce charmant square où  il fait bon profiter des beaux jours. Derrière ce carré de verdure se trouve à l’emplacement de la prison du Temple la mairie du IIIè arrondissement.

Ouf il reste de l’eau. Je ne suis pas totalement hors sujet.

A l’est du square, prenons la rue des Archives direction le 4ème arrondissement. Nous sommes dans le secteur du Haut Marais. Merveilles historiques et architecturales nous attendent. Ici le Musée des Archives Nationales, Hôtel de Clisson ou le Cloître des Billettes se dressent fièrement.

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Portail fortifié, tourelles, ce qui était l’Hôtel Clisson avant d’abriter les Archives Nationales fut la résidence de la famille de Guise. C’est ici que les ligueurs auraient organisé le massacre de la Saint-Barthélémy.

Un peu plus loin au 16 rue des Francs-Bourgeois se trouve la pépite des musées parisiens. Le musée Carnavalet  installé dans deux hôtels particuliers, Carnavalet (ou vécu Madame de Sévigné) et Saint-Fargeau, ce splendide musée raconte l’histoire de Paris depuis la préhistoire. Dès son entrée nous sommes happés par cette grande salle dédiée aux enseignes parisiennes des marchands du XVIème au XXème siècle.

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Moment d’émotion dans la salle de la Révolution française où comme je le disais plus haut, nous retrouvons le mobilier de la prison du Temple où étaient enfermés Louis XVI et sa famille.

Chambre de la famille royale à la prison du temple.
Mèche de cheveux de Marie-Antoinette
Page du cahier d’écriture du Dauphin.
Maquette réalisée avec les pierres de la véritable Bastille

Dans un tout autre registre. Marcel et sa madeleine.

Chambre de Marcel Proust

Après l’histoire place à l’art. L’hôtel Salé, hôtel particulier datant du XVII ème siècle abrite le superbe musée Picasso. Il doit son nom à son premier propriétaire Pierre Aubert de Fontenay précepteur de la gabelle. Son job était de s’enrichir en percevant au nom du roi l’impôt sur le sel. Sel, hôtel Salé vous m’suivez?

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Le joyau de ce quartier est sans conteste, la Place des Vosges avec ses briques rouges, sa pierre blanche et ses toits d’ardoises. Décidée par ? Henri IV bien-sûr. Mais avant retournons en arrière. A l’époque de l’Hôtel des Tournelles qui doit son nom à la quantité de tours dont il était doté. Ce palais fut longtemps la résidence des rois de France jusqu’à ce que Henri (II cette fois) décide lors du mariage de sa fille de faire son kéké et participe aux tournois. Mortellement blessé à l’œil, il est transféré au Palais des Tournelles. Après dix jours d’agonie, il meurt dans son palais aux multiples tours. Sa veuve Catherine de Médicis morte de chagrin fera raser l’édifice et réservera un sort identique au compagnon de joute de son défunt mari bien que le roi lui ait pardonné avant de trépasser. Ce palais qui n’existe plus se trouvait sur la partie nord de la place de Vosges.

Une place spacieuse et esthétique comme le souhaitait Henri IV
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Plus qu’ailleurs les spectacles de rue dans le Marais sont fabuleux.

Sur cette place on peut admirer le Pavillon du roi, le Pavillon de la reine, ses arcades et galeries d’art, la statue de Louis XIII mais mon coup de cœur se porte sur l’Hôtel de Rohan-Guéménée à l’angle de la place. Il abrite la maison qu’a occupée Victor Hugo de 1832 à 1848, avec sa femme Adèle Foucher, et leurs enfants.

Maison de Victor Hugo. Salon Chinois

En reprenant la rue des Francs-Bourgeois nous arrivons vers les rues Vielle du Temple, des Blancs Manteaux, mais aussi rue des Rosiers célèbre avec sa communauté juive, ses épiceries et spécialités culinaires. Là où le falafel est roi, je préfère me régaler d’une boule au miel ou d’un roulé au pavot que je trouve chez Murciano. Atmosphère unique aux heures de pointes et ambiance assurée. 
Le Marais c’est bien-sur mes chouchous de la communauté Gay avec des commerces, bars, clubs qui apportent une réelle dynamique au quartier. Quand Histoire et vie parisienne branchée cohabitent ça donne le plus beau quartier de Paris.

Maison Hérouet angle de la rue des Francs-Bourgeois et rue Vieille du Temple qui a résisté tant bien que mal aux bombardements de la seconde guerre mondiale.

 

L’espace des Blancs Manteaux où s’élevait la porte Barbette auprès de laquelle le duc d’Orléans frère de Charles VI fut assassiné en 1407. Son cousin Jean sans Peur était dans le coup.

Contrairement à ce que l’on pense, c’est dans le quartier du Marais que se trouve la plus ancienne communauté chinoises et non dans le 13 ème arrondissement. Arrivés du nord de la Chine lors de la première guerre mondiale pour apporter de la main d’oeuvre. En réalité des travailleurs forcés envoyés en France sous le traité signé entre les deux pays. Dans le Marais nous avons donc aussi un superbe défilé à l’occasion du nouvel an chinois.

Nouvel an chinois dans le 3ème arrondissement.

Je vous le disais, l’idéal dans ce quartier est de flâner sans but précis, et de se perdre. Passons par la rue des Mauvais Garçons, traversons la rue de Rivoli. Si le hasard vous mène au niveau du métro Saint-Paul qui sait peut être que vos pas vous guideront vers les rues François Miron et du Prévôt.

Première découverte, ces maisons à pans de bois typique du moyen-âge. Malgré leur jolies façades ce ne sont pas les plus anciennes.
Au bout de la rue (étroite) du Prévôt…
…se trouve l »Hotel de Sens, un des rares vestiges de l’habitation civile du Moyen-Âge. Il fut occupé un temps par la reine Margot qui y organisait ses petites javas.

Il m’est malheureusement impossible d’évoquer toutes les richesses historiques, architecturales ou anecdotiques sorties de cet ancien marécage. A vous de découvrir l’ancien hammam Saint-Paul, le square Georges-Cain, le village Saint-Paul, l’Orme Saint-Gervais ou encore la maison du Grand Pignon.

Je peux en revanche et avec plaisir partager quelques unes de mes bonnes adresses.

-Une délicieuse gaufre? Ou une bonne pâtisserie ? Meert  rue Elzévir dans le 3ème non loin du musée Picasso.
-Un resto sympa et pas trop cher pour le quartier? Page 35 une crêperie bien sympa et galerie d’art en même temps. Rue du Parc Royal.
-Une bonne bière ? Écossaise la bière. A deux pas des maisons à pans de bois de la rue François Miron se trouve un authentique pub écossais The Auld Alliance en hommage à l’alliance France-Ecosse.
-Faire son marché? Le Marché des Enfants rouges le plus vieux de Paris.
-Un bon roulé au pavot? C’est chez Murciano rue des Rosiers.
-Une bonne tranche de saucisson? Caractère de Cochon bien-sûr rue Charlot.
La Halle des Blancs Manteaux organise des événements variés.
Impasse des Arbalétriers j’aime beaucoup les artistes-créateurs qui s’y installent régulièrement.
-Mon chouchou? Le Connetable rue des Archives. Ancien hôtel particulier, haut lieu de la chanson française. On y va pour boire un verre, dîner et surtout voir ses spectacles qui se déroulent au sous-sol.

Origines des noms des rues.

La rue des Francs -Bourgeois ici vivaient des bourgeois si pauvres, qu’ils étaient exempts de taxes, « francs de taxes » . Donc « francs-bourgeois ».
La rue des Rosiers pour le grand nombre de rosiers qui y poussaient.
La rue des Mauvais Graçons deux significations lui sont attribuées. La première dit que cette rue était un coupe-gorge, la seconde évoque les bouchers du quartier qui faisaient pas mal de tapage.
La rue du Figuier
Un superbe figuier faisait face à l’hôtel de Sens où à vécu la reine Margot. L’arbre n’y est plus. Il gênait le passage du carrosse de madame qui l’a fait raser. Connasse !
Il n’y avait pas trop de boue dans cette balade, même pas du tout mais j’espère qu’elle vous aura donné envie de venir flâner dans le quartier.
Que vous connaissez ou pas le Marais,  je vous conseille vivement de le (re) découvrir avec une visite guidée. Histoires insolites, coins secrets et anecdotes vous serons dévoilées.
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14 réflexions sur “Le Marais cette zone (jadis) humide

  1. J’aime beaucoup ce quartier, j’avais fait le Carnavalet il y a quelques années ainsi que le musée Victor Hugo ! Tu m’apprends qu’il y a un Meert sur Paris, hum, je ne vais pas tarder à y faire un crochet, j’ai découvert ça à Lille et les gaufres fourrées à la vanille m’ont conquises ! 😀

    Aimé par 1 personne

    1. Carnavet est un musée magnifique. J’ai hâte qu’il réouvre. Oui Meert est à deux pas du musée Picasso. Pour tout t’avouer, je n’ai pas encore goûté leurs leurs gaufres. Chaque fois je craque pour leurs gâteaux au citron. 🤗 Merci pour ton commentaire Anne.

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  2. Le Marais, un quartier chic sorti tout droit d’un ancien marécage… Mais qui as dit que tu étais hors-sujet ? Moi je ne connais pas, et j’ai apprécié cette balade en ta compagnie, bien au sec… Merci pour la découverte !

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